J'avais eu beau frimer en février sur mon lâcher-prise, eh bien, il y avait encore un peu de taf... Récapitulatif d'un passage délicat.
Malgré l'enthousiasme de la majorité des lecteurs d'Eternelle*, il y a quelques semaines, les ventes se sont complètement taries. Quelque chose bloquait sérieusement et mon moral prenait la tangente.
- Demande-toi pourquoi tu crées cela, s'écria soudain le Maître tapi en moi. Si quelque chose dans ta vie te dérange mais subsiste, c'est que tu y trouves ton compte. Sinon, ce ne serait pas là.
J'ai soupiré. En étant très très très honnête avec myself, c'est vrai que j'avais profondément besoin de tranquillité, de ne plus rendre de comptes à personne, bref de décrocher.
- D'abord, c'est quoi pour toi, le succès? questionne-t-il en se calant dans le confortable hamac qu'il a suspendu au sein de ma petite personne pour profiter en spectateur de mes expériences humaines.
Ben... Sûr que ce n'est pas la visibilité d'un pipeul qui joue les odalisques sur Instagram ou d'un Macron qui mobilise 2500 ninjas pour détruire des buttes de permaculture (j'y ai cru longtemps, pourtant, à "En marche") et encore moins la "réussite" dans laquelle le boss de Facebook est empêtré...
Le Maître brandit son cigare:
- De quoi parles-tu? D'avoir pu changer le regard d'une seule personne sur la mort, c'est cela le vrai succès! D'inviter les lecteurs dans ton univers, de les avoir fait rêver ou se questionner... C'est déjà immense!
Il a raison, le bougre. Il y a déjà accomplissement.
- Que représente un aléa commercial en regard du flux de conscience que génère un bouquin ? Son énergie circule, chatouille ceux qui sont prêts, éclaire une foultitude de possibles pour les autres... Allez, Fillette, emmène-moi en voyage!
Flanquée de Paul Derville, lui aussi auteur aux ventes aléatoires malgré l'enthousiasme de son lectorat, nous partons pour la Bretagne dans son van aménagé, sans date de retour. Les vents maritimes dissipent aigreur et tristesse, le chant de l'océan berce mes nuits, les crêpes au blé noir veloutent mes jours... Eternelle passe au second plan (à l'oublier plusieurs jours d'affilée: du jamais vu depuis 3 ans!) La vraie vie reprend le dessus, avec ses rencontres touchantes, ses danses sur la plage, les rires enfantins de la simple sensualité d'exister. L'envie d'écrire juste pour la joie de créer et d'inventer des personnages, de continuer ces itinérances si nourrissantes pour l'âme émerge doucement... Merci au pays des druides!
Avec la distance, j'ai compris que pour l'immense majorité des lecteurs, la mort est encore un sujet délicat et hautement tabou, même - voire surtout - traitée de manière familière et joyeuse. A l'issue de ma dernière causerie, Théo Bondolfi, le créateur de la Smala m'avait d'aileurs glissé: "Avec son contenu chaud-bouillant, Eternelle est beaucoup trop en avance sur son temps! Il me fait penser à la Belle verte, le film de Coline Serreau qui s'est planté grave à sa sortie en 1996... Aujourd'hui, 22 ans plus tard, ce film est devenu culte, il comptabilise des millions de vues, le record absolu pour un film français!"
En voilà une bien bonne! Si ce bouquin sur la vie après la mort devait connaître le même type de destin (toutes proportions gardées), manquerait plus qu'il fasse un tabac après mon décès!!!
* Dernier commentaire en date, Enfin un Lonely Planet de l'au-delà! de l'excellente chroniqueuse et journaliste Anna Lietti déposé tel une crêpe-dentelle sur Amazon: quel honneur...